Toujours aussi vide
Rien ne me débarrasse de mes idées de violence, de souffrance, de danger, de mort… J’ai passé la journée à dissimuler ce mélange, à tenter de me distraire par tous les moyens. Je fais ça tout le temps, me distraire. La vie m’ennuie, les gens m’ennuient, moi-même je me trouve ennuyeuse. Et je me sens toujours aussi vide. Il ne m’arrive que quelques péripéties au cours de ma journée, quelques petites embrouilles qui se règlent d’elles-même et qui ne changent rien à la monotonie de ma vie. Certains diraient que je devrais m’estimer heureuse de ne pas être constamment submergée par les soucis, que je me fais tout un film de ce que je ressens alors que ce n’est rien de grave. Je suis trop sensible, j’y peux rien. Et puis, même si ma vie a l’air plutôt calme, c’est justement ce calme qui m’étouffe. C’est simple : je ne peux pas supporter cette immobilité. C’est trop pour moi, c’est horrible de voir cet ennui qui recouvre tout, alors qu’en moi c’est la tempête, le bordel intégral, le foutoir complet…
Je me sens complètement vide, uniquement traversée par des pensées terrifiantes de temps à autre. Les jours se succèdent et je ne peux m’empêcher de me demander : qu’est-ce qui sera différent dans un mois, dans un an, dans dix ans ? Et j’angoisse de constater que la réponse sera : rien du tout. Ou alors si peu. Quel est le but d’avancer, de passer ces journées, d’avoir un an de plus ?
J’ai arrêté le poppers. Tout à l’heure, j’ai pété un câble, je sais pas trop ce qui m’a pris, j’avais la fiole dans la main et je l’ai éclatée contre un mur. Plus de poppers. Et je n’ai pas l’intention d’en racheter. Enfin, pas pour l’instant. J’ai plutôt été tenté de m’acheter des clopes. J’aimerais trouver quelque chose de pire. Des anti-dépresseurs peut-être ? Je ne sais même pas comment m’en procurer. J’ai bu une bière aujourd’hui, j’ai pas pu m’empêcher d’en prendre une deuxième, et puis une troisième… je suis arrivée à mon stage bourrée. Personne n’a rien remarqué. Faut dire que pour classer des bouquins le cul assis sur une chaise, y a pas besoin d’avoir toutes ses facultés mentales, hein.
Je me déteste. Je me dégoûte, aussi. Je sais plus quoi faire de moi.