La rage au cœur
Putain de journée… C’est quand même assez rare que j’ai des journées où je me retrouve dans un état pareil, généralement c’est plus quelque chose qui ne dure que quelques heures. Mais là, j’ai eu la rage. Et pourtant, je n’avais aucune véritable raison d’être aussi en colère, d’avoir cette envie d’exploser à tout moment. J’avais même tout pour passer une journée des plus calmes. Un vendredi sans boulot, du temps pour moi et pour essayer enfin de dormir correctement, du silence pour écouter des chansons magnifiques et apaisantes… j’avais tout pour réussir à mettre mon mal-être à distance au moins pendant une journée. Il a suffit d’un rendez-vous avec un conseiller bancaire pour que je me transforme en volcan. En soi, le problème n’a rien de si grave, et encore une fois, la plupart des gens ne se seraient pas énervés autant pour si peu. Mais je ne suis pas la plupart des gens. Je suis pire.
Demain soir, j’ai prévu de sortir. J’ai déjà passé deux journées dans un état lamentable, je refuse d’en subir une troisième, je ne pourrais pas le supporter. Tout à l’heure, j’ai encore songé à en finir avec tout ça, avec tout ce monde, tout ce bruit, toutes ces douleurs… j’ai entaillé ma peau, j’ai fait des coupures rouges encore et encore, et j’ai regardé le sang couler avec un regard vide, mon regard, celui de mon reflet dans le miroir qui s’est mit à me fixer. Je sors demain pour éviter de me retrouver à nouveau seule dans ma salle de bain, ou encore seule dans la cuisine avec toute la nourriture autour de moi et cette envie de manger alors que je n’ai pas faim. Je sors demain pour avoir une excuse et dire à ma famille que je ne suis pas disponible pour les voir. Mais j’ai la rage au cœur, la rage, la rage… celle qui explose comme une bombe à la figure de n’importe qui, celle qui me fait cogner mes poings contre tout ce que je peux trouver. J’ai la rage qui me réchauffe le cœur tout en me le brûlant. Dans ces moments-là, je me sens plus que jamais comme un monstre ; prise par mes pires pulsions, incontrôlable, impossible à suivre, dangereuse pour moi comme pour les autres…